KABILA KAGAME

Hermétiquement surveillé à l'ambassade des Etats-Unis à Kigali, Bosco Tanganda en route pour la CPI, charge Joseph Kabila. Selon une indiscrétion du NSA (National Security Agency, littéralement «Agence de Sécurité Nationale »), l'homme aurait expliqué toute l'architecture de la plus grande maffia organisée par J. Kabila et ses amis dans la région des grands lacs. Plus de 13 Chefs d'Etats sont cités, plusieurs firmes internationales également.

Bosco Ntaganda est l'araignée tissant sa toile de violence et de mise à sac au Nord-Kivu, dans l'est du Congo. Ce Terminator organise des enlèvements, passe des matières premières en contrebande au Rwanda et est activement impliqué dans la déforestation du Parc des Virunga. Et bien que Ntaganda soit recherché par la Cour pénale internationale pour crimes contre l'humanité, il coulait des jours paisibles à Goma, à quelques mètres à peine de la frontière rwandaise. Une situation qui s'explique par le fait que Bosco Ntaganda sert, en réalité, les intérêts du Président congolais Kabila ainsi que ceux de son homologue rwandais, Paul Kagame. Le mariage de raison conclu fin 2009 entre Kabila et Kagame repose sur une seule personne : Bosco Ntaganda.

Criminel de guerre promu au rang de général, Bosco Tanganda est né en 1974 dans la région de Bigogwe au Rwanda, Ntaganda déménage, enfant, à Masisi (Nyamitaba). En 1990, à l'âge de 17 ans, il rejoint l'armée tutsie de Kagame pour envahir, au départ de l'Ouganda, le Rwanda dirigé par la majorité hutue depuis plus de 30 ans. Ils occupent le nord du pays. Quatre ans et un génocide plus tard, ils s'emparent du pouvoir au Rwanda.

En 1996, l'armée rwandaise envahit le Congo qu'elle conquiert avec l'aide de Laurent Désiré Kabila. Au moment où Kabila père n'écoute plus suffisamment Kagame, les Rwandais lancent, au départ de l'est du Congo, une nouvelle guerre avec leur propre armée et toutes sortes de milices «locales », au sein desquelles le rôle tenu par Ntaganda ne cesse de s'amplifier. En 2008, il succède à Laurent Nkunda comme numéro deux du CNDP.

Lorsque l'ex-patron du renseignement rwandais, Patrick Karegeya, se détournent de Kagame, en 2010, pour rechercher un soutien au Congo en vue d'attaquer ce dernier. »Quelqu'un comme Ntaganda, qui contrôle le CNDP, s'avère dès lors un pion essentiel pour Kagame.

Pour Kabila aussi, Ntaganda s'avère cependant d'une grande utilité., affirme Kris Berwouts, experts dans la région des grands lacs : «Avec le CNDP, Kabila a mis dans sa poche la seule puissance qui lui permettait de stabiliser quelque peu l'est du Congo, tout en servant ses intérêts électoraux. Ainsi, durant les élections, seul Kabila a pu mener campagne dans les territoires aux mains du CNDP. »Toutefois, le CNDP est resté un État dans l'État, il a instauré sa propre administration à Masisi et est aujourd'hui perçu par une grande majorité de la population plutôt comme une menace que comme une protection, et cela, ce n'était pas vraiment prévu au programme.

Ntaganda veille, par conséquent, aux intérêts tant de Kagame que de Kabila. C'est ce qui explique pourquoi en 2009, il est devenu général de l'armée congolaise, alors même que la Cour pénale internationale avait lancé, trois ans auparavant, un mandat d'arrêt contre lui pour crimes contre l'humanité dont, en première instance, l'enrôlement d'enfants-soldats. L'ONU recherche également Ntaganda pour sa responsabilité militaire dans le massacre de Kiwanja (2008), qui a coûté la vie à 150 personnes au moins.

Dans l'optique de défendre leurs intérêts, Kagame et Kabila ont conclu un accord mis en pratique par Ntaganda. Ce deal apporte une tranquillité toute relative et parfois véritablement violente, tourne en dérision l'État de droit, fait fi des traités internationaux et entrave la reconstruction de la région. Et quiconque ose émettre des critiques risque sa vie.

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