M23

Le M23 caresse l'idée de reprendre le contrôle de Goma. Le chef-lieu du Nord-Kivu est la nouvelle cible de cette force négative. Sans retenue, l'option est clairement rapportée sur le terrain des opérations militaires. Le quartier général est déplacé de Bunagana à moins de 10 km de Goma à Kibati. Curieusement, cette violation flagrante du gentleman agreement tacitement conclu avec la Brigade spéciale d'intervention de la Monusco n'émeut ni à Kinshasa encore moins à Kampala où se pilotent les pourparlers avec ce groupe rebelle. Le M23 n'a pas l'intention, et pas du tout, de dégager. Le mouvement soutenu par Kigali et Kampala compte carrément s'installer. Durablement !

Le laborieux processus des pourparlers de Kampala entre le M23 et le gouvernement n'accouchera que d'un cancrelat. C'est une lapalissade. La partie est jouée, à l'avance, par des pays agresseurs qui contrôlent tout le processus de ces pourparlers. Tout est fait pour que les revendications du M23, porte-voix de Kigali et, dans une certaine mesure, de Kampala, soient entendues et avalisées par la voie de ces concertations placées sous l'égide de la Conférence internationale sur la région des Grands lacs, CIRGL.

Etant entendu la résistance de la délégation congolaise dépêchée à Kampala, sur la table des négociations, rien de ce qui effarouche la souveraineté et l'intangibilité des frontières de la RDC ne passera. D'ailleurs, l'opinion nationale exerce une telle vigilance sur les délégués à Kampala qu'il devient illusoire pour le M23 et ses parrains d'obtenir des concessions majeures en lien avec leur cahier des charges.

Pour cette raison, le mode opératoire sur le terrain s'adapte à cette évolution. Pour mettre davantage de pression, le M23, inspiré par ses parrains, vient de rapprocher son quartier général de Goma, la nouvelle cible militaire en vue. Aussi, de Bunagana, le QG du M23 est-il désormais déplacé vers Kibati. Ce signal du M23 démontre, si besoin en était encore, que pour ce mouvement rebelle, les pourparlers de Kampala n'ont de sens que si les territoires sous son contrôle devraient demeurer encore longtemps sous son emprise.

Le M23 campe sur le statu quo en vue d'administrer, «pour cinq années renouvelables ! », des espaces plus grands que le Rwanda. Hypothèse absurde, pour des Congolais censés lutter pour l'intégrité de leur pays, la bonne gouvernance, le respect des droits de l'Homme, ... De la poudre qu'aucun Congolais n'a accepté.

CURIEUX POSITIONNEMENT DE LA BRIGADE SPECIALE

Le poison de la balkanisation du pays a vite remis les pendules à l'heure notamment sur la dangerosité de la démarche de Kampala. Désormais, il n'est plus question des supputations. Le M23 agit dans le sens de gagner du temps et de consolider ses positions.

Tant que le M23 se tiendrait cantonné dans ses positions, la force spéciale de la Monusco ne s'attaquera pas à lui. Cet appel ne semble pas avoir été entendu par cette force négative. Tournant en bourrique la République, le M23 s'est fait fort de défier la force spéciale de la Monusco. En effet, le fait de prendre position près de Goma doit se comprendre comme un pas vers le déclenchement des actions offensives.

Entretemps, la brigade spéciale laisse faire. Et, aussi curieux que cela puisse paraitre, ceux qui ont pour mission de contraindre les forces négatives de l'Est à la disparition, se cantonnent à Goma. Ces éléments ne se déploient pas loin de la ville. Ils opèrent dans la ville. La nuance est là. Le M23 qui décrypte la tactique, se permet d'avancer ses pions, créant des inévitables zones tampon qui se transforment en «territoires sous le contrôle du M23 ».
La Brigade spéciale d'intervention mise en place par la résolution 2098 n'a pas une mission d'observation ni de police. Loin de là. Elle est créée pour traquer les forces négatives. Y compris le M23. Le Conseil de sécurité est clair là-dessus, n'en déplaise à ceux qui font une autre lecture de cette résolution. Cela n'induit-il pas que la brigade spéciale laisserait des espaces à occuper au M23 ?

En s'approchant allégrement de Goma, le M23 nargue tout le monde. Le ridicule de la prise de cette ville, accompagnée par les casques bleus, n'aurait-il pas donné de la matière à réflexion à l'ONU ? Autant de questions qui demeurent sans réponse d'autant que les dispositions de la résolution 2098 sont régulièrement recadrées, voire contredites par des responsables de haut rang de l'ONU.

A titre illustratif, l'Envoyée spéciale Mary Robinson qualifie la brigade spéciale de «force dissuasive ». Ceci justifie-t-il cela ? Le pas est vite franchi et le cantonnement desdits éléments à Goma en serait la preuve la plus éloquente.

SILENCE A KINSHASA ET A KAMPALA

La réaction la plus vigoureuse
Le silence de Kinshasa et de Kampala combiné n'augure rien de bon pour la paix dans la partie orientale de la RDC. Au contraire, ce silence est le reflet des états d'esprit qui habitent les uns et les autres. S'installer durablement dans le statu quo, jouant ainsi le jeu du M23, de Kigali et de Kampala.

-- © Le Potentiel